A l’église Saint-Jacques (Anvers), de jeunes adultes se réunissent chaque mois pour l’Adoration du Saint-Sacrement. Ils sont chaque fois, en moyenne, plus d’une vingtaine. L’abbé Pierre François, résolument proche des jeunes, est à l’origine de ces soirées d’Adoration.
Selon ce prêtre, qui a su capter leur attention, ces jeunes adultes forment une nouvelle catégorie pour la pastorale. « Avant, quand les jeunes terminaient leurs études fin juin, ils se mariaient début juillet. Aujourd’hui, ils terminent leurs études vers vingt-trois ans et se marient vers trente-cinq ans. À moins d’être désespérément ancrés dans des catégories mentales du passé (et dépassées), il faut se rendre à l’évidence: il y a un nouveau créneau dans la pastorale ».
Ces soirées ont réuni pendant l’année 2017-2018 « entre quinze et trente participants à chaque fois ». Un succès qui laisse apparaître un réel attrait pour la spiritualité chrétienne chez les personnes de cette tranche d’âge. Un espoir aussi car, comme le dit l’abbé François, « l’avenir de l’Église dépend fortement de ces gens-là ».
Le souci de la jeunesse
Le pape François insiste beaucoup sur l’attention accordée à la jeunesse. La démarche de l’abbé Pierre François rencontre donc pleinement les objectifs du Souverain Pontife. Mais sur quels aspects se concentrer afin de rencontrer leurs préoccupations? Quels écueils doivent être évités ? Du point de vue la pastorale, l’amitié (au sens large d’agape) est centrale: « Sans la confiance de l’amitié, il ne peut pas y avoir de transmission de la Vérité ». Cette forme d’amitié, non au sens d’un copinage mondain mais bien d’un amour véritable du prochain, doit animer non seulement les prêtres et les évêques, mais également l’ensemble des baptisés. La famille tient également une place importante car, même si beaucoup de jeunes en-deçà de trente ans ne sont pas encore mariés, la possibilité de fonder famille, et les questions qui peuvent naître d’un tel projet, ne sont pas négligeables à cet âge. Pour celui (ou celle) qui se destine à la vie consacrée, la famille peut également être une communauté religieuse.Quant à la doctrine, l’abbé François rappelle qu’elle ne doit pas être négligée: « S’il n’y a pas de transmission de connaissance doctrinale, on construit un château sur le sable: il sera balayé à marée haute ». L’importance de la connaissance de la doctrine est d’autant plus capitale que beaucoup de jeunes ont grandi dans des milieux totalement sécularisés et aimeraient savoir quel est précisément le contenu de la foi catholique: « Ceux que j’appelle ‘les jeunes professionnels’ sont demandeurs de la catéchèse qu’ils n’ont pas reçue au moment de leur initiation chrétienne. Il y vingt-cinq ans, on aurait organisé pour cette tranche d’âge des cours de théologie, parce qu’ils n’auraient pas admis de recevoir de la catéchèse qu’ils estimaient trop enfantine. Au XXIe siècle, les choses ont changé: les jeunes de plus de vingt ans qualifient eux-mêmes de catéchisme l’enseignement qu’ils désirent recevoir ».
En revanche, l’abbé François met en garde contre une tendance à se vouloir excessivement critique et réticent à l’égard de l’héritage reçu du passé: « Lorsque j’étais écolier, dans les années 60 du siècle passé, pour faire jeune et moderne, il fallait s’opposer à tout ce qui était traditionnel, en commençant par l’Église catholique ». Mais entre-temps, une génération nouvelle a grandi, avec des attentes très différentes. Leur but n’est pas tant de « balayer l’histoire, le catéchisme et l’autorité ». Loin s’en faut, car beaucoup de jeunes, qui ont grandi loin de Dieu, dans des familles déchirées par les divorces, fragilisées par une pseudo-liberté qu’ils ont parfois payée très cher, sont désireux de redécouvrir la richesse authentique du catholicisme.
De la jeunesse à l’âge adulte
Les jeunes adultes avec lesquels l’abbé François est en contact admettent humblement qu’ils ont besoin de découvrir les bases de la foi et de la doctrine catholiques. Le terme de catéchisme ne les effraie pas et ils ne redoutent pas d’être, finalement, comme des enfants qui découvrent un trésor. A un âge où il semble de plus en plus difficile de s’engager, ce trésor peut justement les aider à trouver leur voie. L’abbé François souligne à quel point « la foi et la capacité à s’engager s’impliquent l’une l’autre » : « On ne peut pas vraiment déterminer un ordre dans lequel elles apparaissent. Plus on grandit en foi, plus on la pratique et plus on reçoit la force de s’engager ».Or sur les affiches d’événement ou dans le langage courant, les personnes de moins de trente ans sont de plus en plus souvent rangées dans la catégorie des « jeunes ». Le terme « adulte » se fait plus rare. « Il faut admettre que dans les circonstances historiques qui sont les nôtres, il n’est pas automatique qu’une personne de dix-huit ans ou de vingt-et-un ans puisse être considérée comme adulte, loin de là », explique l’abbé François. Pour lui, cette situation est liée aux circonstances historiques dans lesquelles nous nous trouvons: notre société tend à croire que par la raison, l’homme pourrait palier à la blessure du péché et se passer de la grâce. L’homme souffrirait en quelque sorte d’une hybris de la raison, qui, tout en l’empêchant de dépasser ses propres blessures et ses travers, l’enferme dans un orgueil qui barre la route à la maturité et donc, à l’âge adulte. Il s’agit là d’un idéalisme naïf, auquel le réalisme chrétien répond dans le cadre de la Rédemption. « La foi peut jouer un rôle très important dans la prise au sérieux de la réalité », ajoute l’abbé François.
L’Adoration mensuelle des jeunes professionnels a lieu de 19h à 21h en l’église Saint-Jacques à Anvers. La dernière édition avant l’été a eu lieu le jeudi 31 mai. La prochaine sera en octobre.
Renseignements: pf@romanliturgy.org
MMH [Madeleine-Marie Humpers]
Image: CC-BY-SA-Guilhem Vellut
Article publié sur CathoBel le 14 juin 2018: https://www.cathobel.be/2018/06/14/lattente-des-jeunes-adultes-face-a-la-foi-catholique/
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