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vendredi 15 mars 2019

Quand des jeunes femmes portent la mantille. Témoignage


Disparue, la mantille ? Que nenni ! Le dimanche matin, à Bruxelles, des jeunes femmes vont à la messe et remettent la mantille au goût du jour. Pourquoi choisir de porter ce léger voile de dentelle? Afin de mieux comprendre leur choix, nous leur avons posé quelques questions…

Anne-Chantal a 26 ans. Elle est professeure de français. Pour elle, comme pour son amie Madeleine, la mantille exprime le mystère féminin. Un choix mûrement réfléchi. 

À la question « Depuis quand portez-vous la mantille ? », Anne-Chantal répond: « Cela va faire deux ans que je porte la mantille. Pour moi, porter la mantille était comme un appel mystérieux, à la fois raisonné et dépassant cette même raison. Je m'explique. Quand j'ai décidé de porter la mantille, j'étais très consciente de deux choses, la première: que c'était un choix sérieux auquel je voulais être fidèle au quotidien, tout en gardant une souplesse face aux circonstances. La deuxième: que les raisons qui m'avaient poussée à la porter étaient solides (la demande très claire de Saint Paul et la tradition pluriséculaire de l'Eglise). Pourtant j'en comprendrais la portée plus profondément encore avec le temps, en la portant ».

Quant à Madeleine, elle raconte: « J’ai commencé à porter une mantille dès les premières semaines qui ont suivi mon baptême, il y a à peu près un an. C’est à ce moment-là aussi que j’ai découvert le rite traditionnel. Avant Ã§a, je portais souvent un voile quand je priais seule chez moi, mais je n’en mettais pas à l’église car, dans le rite ordinaire, le voile n’est pas habituel. Je ne voulais pas dénoter ou paraître excessivement zélée ».

Humilité et abandon
Pour Anne-Chantal, porter la mantille a d’abord représenté un « saut dans le vide » : c’était « s'engager à quelque chose sans en comprendre toute la teneur et du coup, ce qui est encore plus difficile, assumer que ce ne soit pas vraiment compréhensible pour ceux que mon choix étonnait ».
À l’heure actuelle, Anne-Chantal vit le port de la mantille comme un apprentissage, l’encourageant à l’humilité et à l’abandon au Christ: « Aujourd'hui, j'ai déjà beaucoup avancé, grâce à Dieu. Sans pouvoir dire que j'ai tout compris, je comprends déjà à quel point le port de la mantille n'est pas une décoration dans ma vie spirituelle. La mantille me porte au quotidien, aussi bien quand je la porte que quand je ne la porte pas. Ainsi par exemple, elle m'apprend l'humilité. Ne pas comprendre exactement, ne pas pouvoir l'expliquer, se sentir seule parfois... et par là aussi l'abandon et la fidélité. Être fidèle à l'appel qu'on a reçu malgré les difficultés, les incompréhensions, les mauvaises passes… Le port de la mantille est donc pour un exercice quotidien de l'abandon au Christ. »
Et d’ajouter : « Je n'ai pas porté la mantille parce que je me sentais bien, au contraire, on ne se sent pas forcément bien de se sentir remarquée à cause de la mantille. Paradoxalement, c'est peut-être même cette humiliation qui m'a encouragée à continuer à la porter ».

Vie intérieure
Pour Madeleine, « voiler, recouvrir, ce peut être une manière de révéler qu’il y a, sous le voile, un mystère ». Anne-Chantal ajoute quant à elle : « Porter la mantille était pour moi se mettre entièrement sous le regard de Dieu. C'est mettre de côté les considérations humaines pour se concentrer sur l'essentiel. Quand on regarde dans une église, tout ce qui est voilé est sacré. Ce n'est donc pas un dénigrement, mais c'est une façon d'en protéger le mystère. Ainsi en va-t-il du mystère de la Sainte Vierge. Elle est habillée de façon très simple, modeste et est toujours voilée. Porter la mantille est donc aussi reconnaître le mystère spécifique de la femme, et même plus… Montrer qu'elle a un mystère à cacher, c'est aussi se concentrer sur notre intériorité plutôt que sur notre aspect extérieur ».
Avec la mantille, la dimension invisible de la personne est symbolisée par le voilement. Pour Anne-Chantal, le voile symbolise « le mystère de la vocation féminine »: cette dernière « est à la fois cachée et omniprésente, religieuse, presque mystique ». Elle ajoute que la mantille « est le point de recontre entre le mystère, qu'elle voile, et son incarnation ». « La mantille évoque pour moi la vie intérieure », précise la jeune femme.
Anne-Chantal dément l’idée selon laquelle, avec la mantille, l'Eglise, par peur de la beauté, tendrait à voiler la beauté spécifique de chaque femme : « Le port de la mantille est beaucoup plus profond que cela. En se voilant, les femmes voilent effectivement ce qu'on pourrait considérer leur beauté personnelle, mais en le faisant, elles la confient à Dieu lui-même. Elles s'en remettent à Dieu. En ce sens, la mantille est également le signe de l'abandon à Dieu et de leur vie intérieure. N'est-ce pas respecter vraiment les femmes que de faire primer la beauté intérieure sur la beauté physique ? ».

Assumer son choix
Anne-Chantal raconte la fascination que lui inspirait la mantille, qu’elle avait vu porter par d’autres femmes, avant de choisir de la porter à son tour: « La mantille m'a toujours fascinée bien qu'elle fut considérée comme "rétrograde", "pas de notre temps", etc. La fascination est toujours difficile à expliquer, mais je me souviens de l'élégance des dames qui la portaient, une distinction humble, pieuse qui donnait envie d'avoir les mêmes vertus et [en même temps] le fait que les dames qui portaient la mantille semblaient assumer ce choix dans ses conséquences: savoir qu'on se met à part en la portant ».
Lorsque nous leur demandons si, dans leur famille, d’autres femmes portent la mantille, Anne-Chantal et Madeleine répondent toutes deux par la négative. « Sans avoir été critiquée, raconte Anne-Chantal, je ne me suis pas vraiment sentie encouragée non plus. Pourtant, entre-temps, ma mère m'a offert des mantilles et une de mes sÅ“urs en porte une de temps en temps aussi ». Un choix contagieux ! Pour Madeleine, qui a été baptisée à l’âge adulte, cette pratique n’était évidemment pas de mise. Il s’agit d’une décision libre: « J’ai décidé de porter la mantille de mon propre chef, de manière indépendante et dans un cadre strictement catholique ». Elle ajoute: « Cela ne me dérangerait pas de porter un voile ou une mantille même en-dehors de l’église, étant donné que la symbolique du voile est très belle et très riche. Le problème, c’est que le voile s’est retrouvé au centre de débats sur les femmes musulmanes. Du coup, le voile a, en quelque sorte, échappé aux femmes chrétiennes. » 

Et les hommes?
À l’église, traditionnellement, les femmes se couvrent et les hommes se découvrent en ôtant leur chapeau: « Dans notre culture, explique Anne-Chantal, un homme se découvre par déférence : en saluant quelqu'un, en passant devant une église, etc., exprimant de cette façon son humilité. Tout simplement, il me semble qu'à l'inverse,  les dames se voilent par humilité ». Mais ne serait-ce alors qu’ne simple question de culture ? Pour Anne-Chantal, cette réponse est trop simple. Elle voit dans ce mouvement conjoint un signe de complémentarité. Néanmoins, il est vrai que le chapeau se fait rare chez les hommes. Qu’à cela ne tienne: « j'ai compris qu'il ne faut pas attendre des autres qu'ils agissent pour agir. Souvent, et cela se voit de façon très particulière dans le Nouveau Testament, les dames agissent en premier, ouvrant ainsi la voie aux hommes […] Ce qui me semble important par contre, est cette complémentarité qu'il y a entre les deux ».

À Bruxelles, Anne-Chantal et Madeleine ne sont pas seules à redécouvrir l’usage de la mantille. Bien qu’elle se soit raréfiée, cette dernière n’en demeure pas moins le symbole d’une féminité mystérieuse, dédiée à Dieu et gardant comme but ici-bas, une complémentarité harmonieuse entre l’homme et la femme, dans la fidélité.

Madeleine-Marie Humpers

Image: Madeleine-Marie H. - Tous droits réservés

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