Rechercher dans ce blog

mardi 12 mars 2019

Mois de mai et dévotion mariale: histoire et actualité

Au fil des siècles, le lien se crée progressivement entre le mois de mai et la Sainte Vierge. Aujourd’hui, de nombreux pèlerinages sont organisés en l’honneur de Marie en mai. Ce mois est aussi l’occasion de nombreuses prières mariales.
 
« Pour chaque hirondelle vient son mois de mai », affirme un dicton corse…[1] Celle que le poète Guy Ganachaud nomme « Splendeur des lys de mai » a sa place dans nos prières tous les jours de l’année, mais le mois de mai lui est spécialement dédié. Si les jours sans prière ou les prières qui se tiennent à l’écart de la Vierge ressemblent à de tristes hirondelles, le mois de mai leur apporte une occasion de se souvenir de la Mère de Dieu, de l’intégrer dans nos pensées et dans nos prières afin de la garder toujours dans notre cœur comme notre Mère du Ciel…
Mais à quand remonte exactement l’attribution du mois de mai à Marie?
Au XIIIe siècle, Alphonse X, dit « le Sage », roi de Castille et Léon, en offre une illustration dans l’un de ses chants: « Bienvenue à toi, mois de mai, avec gaieté et sans rancune / Nous prions celle qui nous a fait don de son Fils… »[2]. Avant cette date, le lien entre la Vierge et le mois de Mai ne semble pas avoir laissé de trace.
Mais au siècle suivant, « le bienheureux dominicain Henri de Suse avait, durant l’époque des fleurs, l’habitude de tresser des couronnes pour les offrir, au premier jour de mai, à la Vierge », note le Dictionnaire encyclopédique de Marie[3].
Le même Dictionnaire encyclopédique mentionne un ouvrage intitulé Le mois de mai spirituel, écrit par un bénédictin, Seidl, en 1549.
Ensuite saint Philippe Néri exhortait les jeunes gens « à manifester un culte particulier à Marie pendant le mois de mai ». Il réunissait alors les enfants auprès de l’autel de la Sainte Vierge « pour lui offrir, avec les fleurs du printemps, les vertus qu’il avait fait éclore dans leurs jeunes âmes ».
Au XVIIe siècle, durant le mois de mai, au sein des milieux jésuites de Cologne, sont pratiqués des exercices de piété en l’honneur de la Vierge.
Peu à peu, de plus en plus d’ouvrages associeront Marie et le mois de mai, comme le recueil de poésies Moyen-Pjeiff (1692) de Laurent de Schniffis ou encore Il mese di Maria o sia di Maggio (1785) du jésuite Alfonso Muzzarelli, qui connut un immense succès. « Traduit en français, anglais, portugais, espagnol, allemand ou arabe, il profite de plus de cent éditions avant 1900. Il fournit des réflexions pour chaque jour afin que le fidèle médite sur la vie de Notre-Dame et, surtout, sanctifie son existence en pratiquant les vertus », peut-on lire dans le Dictionnaire historique de la Vierge de Fabienne Henryot et Philippe Martin[4].

Succès de la dévotion

Durant le XVIIIe siècle, la dévotion mariale du mois de mai gagne toute l’Italie[5]. Elle pénètre ensuite la France par l’intermédiaire de Pierre Doré (1733-1816), qui traduit le livre du Père Lalomia sous le nom Mois de Marie ou mois de mai. Louise de France (1737-1787), fille du roi Louis XV, en assure la promotion, bien que les jansénistes soient hostiles à ce texte qu’ils perçoivent comme une « arme romaine de contrôle de la piété mariale ».
Mais selon le Dictionnaire historique de la Vierge, « le véritable essor du mois de Marie date du XIXe siècle ». Le 21 mars 1815, Pie VII, accorde « à ceux qui feront chaque jour quelque prière publique ou particulière, ou quelqu’autre œuvre de piété en l’honneur de la sainte Vierge, 300 jours d’indulgence pour chaque fois, et indulgence plénière le jour qu’ils voudront choisir, à condition qu’ils se confesseront, communieront et prieront pour les besoins de l’Eglise »[6]. La dévotion se répand alors dans l’ensemble du monde catholique. Souvent elle est intégrée à des fêtes locales, dont certaines traditions sont parfois conservées:
« En Touraine, une branche d’aubépine fichée aux portes est un appel à la protection céleste. Des jeunes filles, vêtues de blanc et couronnées de roses, personnifient le printemps; leurs demoiselles d’honneur quêtent des bonbons, gâteries ou piécettes. Ce sont les maïas de Provence, les roses de mai en Bresse, les mairiottes du Jura, les trimazos lorraines, les mariées de mai dans les Ardennes belges… Les traditions sont anciennes, remontant souvent au XVe ou XVIe siècle, mais, en ce XIXe siècle, elles prennent des couleurs mariales. Les anciennes prières et cérémonies agraires sont désormais des odes à la Mère du Sauveur ».
La deuxième strophe du poème  « Maria, Maienkönigin » de Guido Göress illustre ce glissement, allant des traditions populaires à la véritable dévotion pieuse[7]:
« Marie, nous mettons sous ta protection;
Ce qui pousse et fleurit sur la terre
Dans toute cette splendeur et ces ornements,
Donne-nous d’honorer le travail du Créateur ».
Et comme le souligne encore le Dictionnaire historique de la Vierge,« les auteurs du XIXe siècle rivalisent de zèle pour diffuser cette dévotion. Un des plus importants est l’abbé Letourneur Le Nouveau Mois de Marie (Paris, 1823) » qui « rencontre un  immense succès ».
Dans les campagnes, en mai, au XIXe siècle toujours, les enfants et des jeunes filles entonnent des chants à la Vierge: « La Sainte Vierge Marie / S’en va par les champs / sur les bras elle porte / Son tant bel enfant… », entendait-on par exemple en Lorraine. Mais « avec les transformations du monde rural, ces pratiques tendent à disparaître au milieu du XXe siècle ».

Et aujourd’hui?

Aujourd’hui encore, durant ce mois printanier, de nombreux pèlerinages ont lieu en l’honneur de Marie, comme par exemple à Banneux et à Beauraing, le 1er mai prochain.
Dans nos maisons aussi, c’est un moment privilégié pour rendre hommage à la Vierge. On peut lui préparer un oratoire, prendre le temps de fleurir une statue en l’honneur de notre Mère du Ciel…
Ensuite, le mois de mai est bien sûr également l’occasion d’accorder une place particulière à la Vierge dans nos prières. Et pourquoi ne pas porter une attention spéciale aux enfants de Fatima également? C’est ce que le propose le site Hozanna, qui se sert des technologies pour rassembler des communautés de prière autour de différents thèmes, pour des neuvaines ou même des semaines entières, comme dans ce cas du mois de mai.
Concrètement, comment cela se passe-t-il? « Durant les 31 jours du mois de Mai (du 1er au 31 Mai), vous recevrez chaque jour: une méditation sur les différentes apparitions et sur le message [et/ou] une prière ».
À travers cette initiative, Hozanna invite à « mieux connaître les saints enfants de Fatima, [à] prier avec eux et la Très Sainte Vierge, [à] demander leur intercession et [à] mieux comprendre le mystère des apparitions ». Hozanna note que ce mois de prière permet aussi « de faire grandir notre foi ».
Et pour terminer, un poème de Guy Ganachaud, qui célèbre la Reine des lys de mai…
Splendeur des lys de mai, vous êtes notre reine,
L’aurore de nos yeux, la paix de notre soir ;
Et nous plaçons en vous tous nos ciels bleu d’espoir,
Nos rires et nos cœurs et toute notre peine.
Nous cueillerons pour vous, aimable souveraine,
Des fleurs et des Ave tout le long du chemin ;
Et si l’ombre du soir obscurcit le matin,
Trouez d’or et d’azur le mur de notre peine.
Blancheur des lys de mai, Vierge belle et sereine ;
Prenez-nous par la main lorsque viendra le soir ;
Prenez-nous par la main le long de notre peine…
… sans oublier d’offrir un brin de muguet aux personnes qui vous sont chères!

MMH
Image: CC-BY-SA Madeleine-Marie H.

[1] Les proverbes et dictons agricoles de la Corse (1872)
[2] « Ben uennas, Mayo, alegr’ e sen sanna ; / E nos roguemos a quen nos gaanna / Ben de seu Fillo, que nos dé tamanna… »
[3] Mgr Dominique Le Tourneau et Pascal-Raphaël Ambrogi, Dictionnaire
encyclopédique de Marie, Desclée De Brouwer, Paris, 2015
[4] Fabienne Henryot et Philippe Martin (éd.), Dictionnaire historique de la Vierge, Perrin, Paris, 2017
[5] « Au XVIIIe siècle, plusieurs ordres religieux ont une piété particulière pour Marie en mai. Dans leur église Sainte-Claire de Napes, les franciscains célèbrent un office propre. Les dominicains de Fiesole décident en 1701 d’honorer la Vierge tous les jours du mois, imités par les paroisses de Vérone (1734) et Gênes (1747) »
[6] Le Fidèle Serviteur de Marie, Leroux, Strasbourg, 1844
[7] « Maria, dir empfehlen wir,  / was grünt und blüht auf Erden. / Lass uns in dieser Pracht und Zier  / das Werk des Schöpfers ehren ».

Article paru sur CathoBel le 27 avril 2018: https://www.cathobel.be/2018/04/27/mois-de-mai-et-devotion-mariale-histoire-et-actualite-2/

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Stérilité. Faire le deuil de la maternité

Espérer fonder une famille, et se découvrir stérile. Souhaiter devenir mère, et apprendre que cela n’aura pas lieu. La stérilité (...